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"Oulala j'ai peur"*

("we are all going to hell")

projection vidéos dimanche 27 novembre 2011, la semencerie, 42 rue du ban de la roche, 67000 Strasbourg

Programme/

The Inhabitants, 8'45, 1970, Artavazd Pelechian, Ar
Génération optimiste, 12'58, 2008 Léocheynet, Fr
Internal dispacement, hdv 17', 2009, Leander Djønne, No
Everything is gonna be allright, dv5', 2009, Mom & Jerry, No
Fishyfish, dv 5'40, 2010, Philippe Gilmert & Thomas Lasbouygues, Fr
La biche et le cochon, dv 10', 2010, J-C Mougel & Mathias Vouters, Fr

Cette sélection, présentée à Bruxelles en octobre 2010 lors de l’exposition « Fête triste » du collectif « Otto dix club », rassemble des œuvres vidéos aux formes très différentes : approche documentaire aux accents expressionnistes, approche cinématographique progressive et vidéo performance.
Une thématique ou plutôt un sentiment vague relie pourtant ces œuvres : le sentiment de fin, la fin d’une civilisation post-capitaliste sûrement. Les artistes s’emparent de ce sentiment d’inquiétude latent pour célébrer la perte de sens en évoquant la fête, la destruction ou l’animalité.
Nostalgique ? Pas tout à fait, il semble que le discours ne soit jamais univoque, mais plutôt ambivalent. Les artistes présentés dans cette sélection ne se placent pas dans une position d’outsiders de la société consumériste à laquelle ils appartiennent, au contraire, ils sont dedans, mais peut-être contre leur plein gré. L’ensemble des vidéos présentées dans cette sélection puise son discours dans une certaine musicalité, présentant un discours sensuel et immersif plutôt qu’un discours uniquement verbal.

Le choix de montrer le film « Les Habitants », en introduction du programme « We are all going to hell » permet d’introduire une certaine idée du sentiment de « fin de siècle » largement représentée dans l’art contemporain et qui puise ses origines dans des conceptions libertaire et humaniste des années 70. Il semblerait cependant que l’art contemporain ne se situe plus dans cette dichotomie homme-animal, de même que l’humanisme est une philosophie qui ne semble plus répondre pleinement aux interrogations des artistes contemporains. La morale univoque des « Habitants » est un choix qui donne cependant une connotation politique indispensable à la sélection.

" Le film est construit sur l'idée d'une relation pleine d'humanité avec la nature et le monde animal. Il est question bien sûr des agressions perpétrées par l'homme contre la nature, et de la menace que constitue la destruction de l'harmonie naturelle ". Pelechian à propos de son film « Les habitants », datant de 1970.

La fête /
La charge émotionnelle véhiculée par la musique est utilisée comme support ou contrepoint du sens contenu dans l’image. Ainsi, dans la vidéo « Everything is gonna be all right », du binôme norvégien « Mom & Jerry », la musique techno « cheap », les jeux de lumière et l’omniprésence des slogans publicitaires de Time Square, créent un décor apocalyptique, mais coloré pour un discours subversif et complice : on nous assure que « tout va bien ». De même, le titre « Génération optimiste » couplé d’une musique transe, de nuages colorés et de la référence constante au dessin animé dans la vidéo de Leocheynet, promet au spectateur un univers rassurant, voire régressif, le sentiment qui domine cependant est celui de la désillusion.
 
Le paysage détruit /
Avec un traitement cinématographique progressif appuyé par une bande sonore lente et immersive et l’utilisation d’un steadycam qui crée l’impression d’un univers cotonneux et irréel, « Internal dispacement » de Leander Djønne, est une œuvre éminemment politique. Le spectateur plongé dans la vision subjective de la caméra est témoin d’un autodafé commis par des enfants et chapoté par des adultes muets. Cette vidéo met en exergue un dilemme moral et politique à travers des corps et des actions qui semblent êtres commandés par une force supérieure, celles de l’état, du pouvoir politique, de la morale, dont les corps serraient un prolongement plus ou moins inconscient.

L’animalité /
Un retour sur l’animalité dans la programmation, mais cette fois-ci embrassée par un regard mimétique : les artistes Jean-charles Mougel et Mathias Vouters n’adoptent pas en effet une position empathique face à l’animal, leur approche est plutôt mimétique : la « Biche et le cochon », ce sont les artistes eux-mêmes. Leurs personnages sont puérils, grotesques, ce sont des animaux qui agissent en tant que tel : ils sont brutaux, ne s’expriment que pas des grognements. La convocation de l’imagerie animale semble plutôt évoquer ici une perte de repères qui exprimerait la violence du double discours de la morale contemporaine : puritanisme et amoralité.

                                                                     Éléonore Cheynet , le 25 novembre 2011